Publié dans LSPB, 11/2022

Deux réunions récentes ont tenté de proposer des solutions nouvelles au problème aigu du logement en zone touristique.

À Guéthary des parlementaires corses ont proposé un droit de préemption renforcé, financé par une surtaxe régionale sur les plus-values. On entendit aussi parler risque de rébellion, statut de résident, ou Graal absolu du pourcentage de logements sociaux.

Puis à Bayonne Alda, la nouvelle intuition du polymilitant Jean-Noël « Txetx » Etcheverry, dans le contexte des élections HLM, avait convié de prestigieux invités du DAL, de la fondation Abbé Pierre, ou encore l’ancienne ministre Cécile Duflot et le parlementaire LFI François Ruffin, pour la conférence « Urgence logement ».

L’assemblée, considérable pour un soir de tempête, penchait bien à gauche (les gens de droite avaient le débat de la primaire LR) car on entendit parler défense du droit des squatteurs, réquisitions, remise en cause du droit de la propriété ou du capitalisme, etc.

Cependant Cécile Duflot souligna le caractère essentiel du logement pour l’espèce humaine, tandis que François Ruffin rappelait que dans l’histoire, l’Eglise catholique et le Parti communiste avaient été les premiers militants du logement pour tous. 

Ces remarques me plurent car il ne peut pas y avoir de clivage politicien sur ce sujet si essentiel que le logement, juste des échanges sur la méthode. D’où ma méfiance envers ceux qui désignent de forts pratiques boucs émissaires, ou rabâchent les mêmes solutions uniques. 

Car à problème complexe, réponses multiples.

J’ai eu l’avantage de grandir dans un Pays basque où l’on se logeait facilement et où la mixité sociale était spontanée.

Petit problème, il n’y avait pas de boulot et les jeunes partaient à Paris !

C’est la bonne nouvelle derrière cette crise du logement, notre région, longtemps terre d’émigration, est en croissance et c’est très bien. Ou mieux qu’une ville désertée. Mais un problème de riches reste un problème.

Un problème général qui dépasse les clivages partisans ou sociaux. Même celui qui vend avec une plus-value a du mal à se reloger derrière, comme même des couples de commerçants ou des jeunes qui démarrent. Le diagnostic saute aux yeux.

Face à une injustice ou à un dérèglement, la facilité ou le populisme consistent à désigner et chasser de présumés salauds, mais c’est aussi réducteur que dangereux. Posons-nous toutes les questions. 

Pourquoi les prix montent-ils ? Pas seulement à cause du marché.

D’abord une maison d’aujourd’hui est mieux isolée, plus confortable et coûteuse qu’autrefois. Ensuite il faut plus de logements pour une même population, grâce aux joies de la « décohabitation » (le divorce !). Enfin notre région est mieux équipée qu’il y a 20 ou 30 ans, des spectacles, des restaurants, des médecins, un sentiment de sécurité. Et même les bouchons des grandes villes ! Et ça ça vaut des sous. 

Sommes-nous seuls au monde ? Pas du tout !

Mon copain Tidiane de Dakar m’annonce que chez lui les prix ont doublé. Et le maire d’un arrondissement parisien me confiait s’estimer « dernier des Mohicans » face aux achats d’appartements par de riches Suisses ou Américains. Tandis que le 8e est désormais classé … désert médical. Paris, so romantic !

A qui profite le crime ? A tout le monde !

Aux promoteurs bien entendu. De grands méchants loups ? Des entreprises avec des employés qui habitent ici, mettent les enfants à l’école, donnent de l’argent à la pelote ou au rugby, et payent des impôts. Aux propriétaires fonciers aussi ! Souvent de vieilles familles du coin, heureuses de faire une bonne affaire et de payer des droits de succession. A Ondres, même l’ancienne mairie avait fait une plus-value sur le dos de propriétaires expropriés, qui ont dû poursuivre en justice. 

Mais aussi aux architectes, aux maçons ou charpentiers et à leurs employés, aux boîtes de BTP dont beaucoup sont à l’intérieur, aux collectivités qui encaissent les droits de mutation, aux banques, aux concierges d’appartements locatifs, et même aux offices HLM qui de mémoire ne sont pas des œuvres de charité. 

Peut-on pour autant interdire les résidences secondaires ? Impossible pour des raisons légales et morales. 

Légales car le droit de propriété est inscrit dans la Constitution depuis 1789, à l’origine pour protéger les petites gens, après que le Roi fut propriétaire de tout. De plus la sécurité juridique est un des éléments de la prospérité de l’Europe, qui protège notre niveau de vie, nos retraites, la santé ! 

Et morales, car qui sont ces résidents secondaires ou doubles résidents ? Je ne connais pas de VIP international (une rumeur annonçait Gwyneth Paltrow à Urrugne, ce fut un concessionnaire auto de la région), mais plutôt une fille d’ici qui fait carrière entre Paris et Bordeaux, un couple où lui travaille à Paris et elle à Biarritz, des paysans béarnais qui possèdent un appartement à Ciboure ou des Bayonnais un studio au ski, un Souletin ici ou une Dacquoise là. Ne comptez pas sur moi pour les expulser. 

Bref notre Sud-Aquitaine a toujours privilégié une économie « résidentielle » et si celle-ci s’emballe il faut la réguler, pas la tuer.

A suivre la semaine prochaine, des solutions !